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RUE DES KEBABS

Responsable scientifique : Catherine GAUTHIER Financé par la DRAC et la Région Auvergne-Rhône-Alpes

Les commerces de détails dans les centres anciens des petites villes à partir de l’exemple des kebabs.

À travers une analyse sociologique et architecturale il s’agit de comprendre les phénomènes et représentations liés au développement et à l’évolution des restaurants kebabs dans les quartiers populaires de centres anciens de 5 villes de la région AURA. Ce programme de recherche se décline en actions culturelles et pédagogiques, expositions, conférences, plateaux radio… visant un public hétéroclite. La réalisation d’un documentaire suit la logique d’une « anthropologie partagée » (Jean Rouch), posture assumée de l’anthropologue soumettant ses résultats en cours de tournage à ses interlocuteurs aussi variés soient-ils : le décideur, l’aménageur, le financeur, le commerçant, l’habitant, l’usager, le client, le touriste, l’éducateur, l’animateur ou le représentant associatif, l’électeur… Au fil des rues marchandes de Saint-Étienne, Clermont-Ferrand et Montluçon ce travail cherche à interroger et croiser les différents regards portés sur ce qu’on appelle la « rue des kebabs ». Il tente de saisir les modes d’usage de ces lieux de consommation et de sociabilités ordinaires, tout en s’efforçant de comprendre comment ces commerces participent à la dynamique économique et sociale,et co-construisent l’image de villes en pleine mutation.

Considérant l’implantation de certains commerces comme des indicateurs d’urbanité la présence des kebabs est souvent considérée comme un « trouble » de l’ordre public, esthétique, social, culture ; l’enquête essaie de restituer l’ordre de ces rues:

  • Un ordre (cohésion sociale) qui relève plus de la veille sociale et du maintien de lien de sociabilités dans des quartiers défavorisés ou malmenés par les démolitions-reconstructions où il fait généralement défaut. On y relève une mixité sociale plus réelle que dans les grandes enseignes de fast-food ne proposant pas de viande hallal par exemple. En milieu semi-rural, le kebab reste également le signe du vivant, de la rencontre, de la convivialité, de la présence de la jeunesse.
  • Un ordre public, de la régulation du désordre dans les usages de la rue, canalisant la délinquance par une veille aux jours et heures les plus creuses des quartiers populaires et petites villes de nos campagnes. Un code moral s’impose également au sein de ces commerces à la conduite des client-e-s, variable selon les temporalités.
  • Un ordre commercial et de services : celui du libéralisme, de la concurrence par concentration, de l’ubérisation et dématérialisation de la consommation. Par ailleurs, si les enseignes crachent une lumière crue, c’est bien souvent la seule à demeurer allumée les dimanches, les jours fériés et au cœur de la nuit. L’animation de l’espace public est ainsi fortement liée à leur présence, ouverture ou fermeture.
  • Un ordre urbain et/ou architectural : celui de pas-de-porte ouvert, de rez-de-chaussée assurant une certaine vitalité pour l’immeuble qu’il supporte, dans des territoires peu denses, particulièrement en quartier sensible, subissant une décroissance urbaine et économique. Ces rues dessinent dans l’espace urbain les axes d’une consommation singulière et d’une clientèle mobile et variée, tendus entre l’hyper-centre, ces centralités populaires et les périphéries et marges urbaines.

L’ensemble de ce programme a été lauréat en 2019 et 2020 de l’appel à projet « Mémoires du 20e et du 21e siècle » financé par la DRAC et la Région Auvergne Rhône-Alpes.

→ Documentaire réalisé par Catherine Gauthier, avec des photographies de Sandrine Binoux et une bande son de Dan Charles Dahan : https://www.youtube.com/watch?v=E5-PoHVdXiY