Responsables scientifiques : Bénédicte CHALJUB, Olivier DOLLFUS, Amélie FLAMAND
Projet co-financé par la Région Auvergne Rhône Alpes dans le cadre de l’appel à projets 2022 “Mémoires des XXe et XXIe siècles” à hauteur de 15 000€ de 2022 à 2025.
Nous engageons une recherche portant sur les Cités Michelin en faisant l’hypothèse que malgré leur banalité apparente, leur implantation en périphérie et leur non reconnaissance institutionnelle, les cités Michelin constituent un patrimoine fort.

Édifiées très majoritairement pendant l’entre-deux guerres à l’est de Clermont-Ferrand, les cités Michelin illustrent une volonté paternaliste assez unique en France. Elles sont alors conçues comme un ensemble de maisons jumelées en série, au confort de l’époque, issues d’une ambition de rentabilité du chantier et des coûts, à l’instar de la production automobile, mais accompagnées de jardins et d’équipements nécessaires, églises, dispensaire, écoles, coopératives, etc. 3000 logements ont ainsi été construits dans la seule décennie 1920. D’autres cités suivront, mettant en œuvre d’autres typologies, comme des lotissements en bande, dans les années 1950 à 1960, puis des immeubles. Bien qu’en partie démolies, elles forment encore une des identités fortes de la ville. Elles sont gérées par des bailleurs sociaux ou rachetées par leurs habitants et connaissent ainsi des évolutions variables. Dans le premier cas, elles peuvent faire l’objet de projets de rénovation d’ensemble pris en charge par des architectes qui redonnent une lecture de l’écriture originelle tout en y ajoutant les éléments nécessaires à l’évolution du confort. Lorsqu’elles ont été rachetées par leurs habitants, elles rendent compte de la multiplicité de leurs appropriations ; la répétition s’estompe alors au profit des singularités de l’invention à l’échelle de l’individu et de la parcelle.
En nous appuyant sur ces deux situations, nous voudrions, à partir d’une analyse pluridisciplinaire (architecturale, historique et sociologique), montrer les potentialités d’adaptation et d’invention que suscitent ces habitations modestes, et interroger à travers elles la notion même de patrimoine. Qu’est-ce qui fait patrimoine au XXIe siècle concernant ce bâti qui semble peu concerner les politiques publiques : s’agit-il des typologies architecturales et de la cohérence d’ensemble, de la rationalité des organisations spatiales (partitions, jumelages, voisinages…), des jardins, ou bien ces mille pratiques créatives des habitants que décrit Michel De Certeau ? Et à ce titre, on peut se demander comment ce bâti est qualifié, approprié, raconté par les habitants dans l’une ou l’autre des situations.
En outre, nous souhaitons explorer des pistes complémentaires dans cette réflexion sur ce qui fait patrimoine et qui nous semblent être au cœur des enjeux contemporains du monde urbain/des villes : la nature et l’usage des jardins, et par là, la place du végétal, et du vivant plus largement ; mais aussi l’ambiance sonore ; ou bien encore le confort thermique.
La méthodologie principale sur laquelle s’appuie ce travail est la collecte de matériaux, à partir d’une série d’outils relevant de nos différentes expertises, à savoir : recueil des informations existantes (publications papier, internet) ; recherches historiques et opérationnelles ; entretiens avec les acteurs, habitants, bailleurs sociaux, maîtres d’œuvre ; relevés architecturaux et relevés habiter ; relevé des jardins et du vivant ; relevés sonores (field recording).
Les objectifs de recherche et de production sont pluriels. Il s’agit de pouvoir publier sous la forme d’articles et ou d’ouvrages scientifiques, mais aussi de concevoir un support de diffusion moins strictement académique et plus interactif (exposition et/ou film et/ou cartographie interactive. In fine cette recherche doit alimenter le projet d’Atlas du logement clermontois porté au sein de Ressources par Bénédicte Chaljub.
